C’est à bicyclette que mon père tombe sous le charme d’Hémevez en 1981. Intrigué par un étroit chemin bifurquant vers un sous-bois, il l’emprunte, longe une église gothique et suit une allée de chênes centenaires au bout de laquelle se dévoile le « château de la belle endormie ». 

Antiquaire parisien et designer fou de vieilles pierres, Claude Brosselin cherche à savoir si les lieux sont à vendre. À l’époque c’est une ruine. Il retrouve les propriétaires, la famille Ango de la Motte de Flers, qui a fui la Guerre au début des années 40. En doux dingue, comme j’aime l’appeler, il acquiert le château à l’hiver 1982. Il neige à l’intérieur mais installe malgré tout ses ateliers d’ébénisterie dans les dépendances. 

20 ans plus tard, j’ai emprunté le même chemin pour retrouver mon père. Et j’ai découvert la maison. Pour la comprendre, il faut être à l’affût des indices que les pierres veulent bien nous donner. Il faut sentir la vie de la bâtisse depuis sa construction, suivre l’évolution de son architecture, des terres attenantes et d’une riche culture, celle du Cotentin.

Amoureuse de ce domaine chargé d’histoire, je décide en 2019 de prendre en main la destinée d’Hémevez tout en y installant à mon tour mon studio de directrice artistique. Jour après jour, la relève s’assure et la passion se transmet. Le travail que j’entreprends ici me permet de vivre à un rythme naturel, à contre-courant d’une cadence effrénée à laquelle le monde est soumis. Je réalise la responsabilité qu’impose un monument historique et renoue avec mes racines. 

Mon père et moi sommes des touche-à-tout investis. Avec nos amis tapissiers, ferronniers et menuisiers, nous travaillons sans relâche à la restauration des bâtiments afin de conserver fidèlement cette bulle de romantisme. Ici, les meubles et les objets, s’ils n’ont pas été façonnés par nos mains, sont les fruits de longues investigations en salle de vente, brocante ou vide-greniers, afin de ponctuer harmonieusement les volumes qui vous sont réservés. Quant aux jardins, ah les jardins…! D’une nature qui avait repris doucement la possession des lieux, nous avons discrètement ici et là suggéré des parterres à la française où nous bouturons par dizaines, roses, buis, agapanthes, palmiers et hortensias…

Nous avons trouvé ici une parenthèse où nous réconcilier avec le monde et partager avec vous ce regard sur la vie porté par la beauté de notre patrimoine. Nous sommes heureux de pouvoir enfin vous en ouvrir les portes.

Bienvenue au château !

Nina Brosselin

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